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Les Suisses vont bientôt voter sur l’initiative populaire « Contre l’élevage intensif ». Les arguments pour et contre se sont fait entendre, cela dit, ils semblent d’un type très différent. Du côté opposé à l’initiative, si on écoute les recommandations du conseil fédéral et du parlement on entend d’une part des arguments basés sur la suffisance des mesures de protection mise en place. D’autres part on entend des arguments qui résultent d’un calcul économique montrant à quel point cela serait couteux en temps, en argent et en praticité de mettre en place uniformément les mesures demandées par ceux qui soutiennent l’initiative. En somme, une acceptation tacite des idéaux du camp opposé nappée d’une couche d’huile de frein pour que la réalité puisse prendre le temps de s’adapter aux demandes qui lui sont faite. De l’autre côté les arguments sont essentiellement moraux : Les animaux sont présentés comme ayant une « dignité » qui exige qu’on les traite mieux que comme ils le sont aujourd’hui. À cela s’ajoute un argument « compromis » écologique qui ajoute une dose de nécessité pratique aux arguments basés sur l’éthique et la morale. Il convient de noter brièvement que l’argument « si on réduit le nombre d’animaux on polluera moins » s’oppose assez vite à l’argument de la dignité de l’animal. En effet, que faire des animaux « excédentaire » ? La réponse est l’abattoir. Cette tentative d’argument pratique mis à part nous avons donc « une opposition douce » à l’initiative contre l’élevage intensif qui n’ose pas s’opposer aux arguments de l’initiative sur le plan éthique. Notons que si aucun argument éthique ne vient s’opposé ce n’est plus qu’une question de temps avant que certaines positions radicales sur le statut des animaux et des hommes ne prennent de l’ampleur. Pas une pente glissante, mais une suite logique découlant du fait que sans fondement éthique une position opposée ne peut pas tenir. Veillons donc à corriger cela en répondant à des questions de fond sur ce qu’est un animal en soit, ce qui différencie un animal d’un Homme et à quel degré de dignité un animal peut prétendre.
La position éthique historique sur ce qu’est un animal par rapport à un humain est essentiellement une différence hiérarchique. Religieusement, l’homme est une créature considérée plus proche de Dieu ou des dieux ce qui lui octroie l’autorisation aux hommes d’en disposer comme bon leur semble. Notez brièvement qu’il n’est pas question ici d’être exhaustif quant à toutes les croyances qui existent cela serait vain et des exceptions existent évidement. Parfois ceci est mitigé en donnant à l’Homme un rôle de « gardien » des animaux, lui donnant ainsi une responsabilité envers ses sujets mais cette mesure n’est là que pour limiter les excès. Des arguments basés sur la capacité de raison donnés par Descartes brièvement dans le discours de la méthode remplacent le caractère divin par la capacité de penser et prendre des décisions qui dépassent l’instinct pur. Dans cette perspective l’être humain est un animal et doit donc du respect aux autres animaux mais les dépasse éthiquement car l’être humain peut prendre des décisions à caractère moral tandis que l’animal ne fait en quelque sorte qu’exécuter son programme sans prendre compte de la notion de bien ou de mal.
Traditionnellement de cette base morale, le respect que doit l’homme à l’animal s’est articulé de deux façons. D’une part est apparu une éthique de gardien de troupeau qui s’assure de la survie et du bien-être des animaux dont il prend soin, dans la mesure où ceux-ci produisent se dont il a besoin. D’autre part une éthique basée sur le respect que nous devons à nos semblables ici sur le plan physique car les animaux ont un corps et des passions (sentiments, émotions, douleurs) comme nous. On évite donc de faire tout mal inutile aux animaux par esprit de compassion.
La dignité animale telle qu’elle est formulée par la confédération suis cette logique : le mal qui est fait à un animal doit être un mal nécessaire pour obtenir ce pourquoi l’animal a été élevé.
« La loi sur la protection des animaux définit la dignité de l’animal comme la valeur propre de l’animal, qui doit être respectée par les personnes qui s’en occupent. Il y a atteinte à la dignité de l’animal lorsque la contrainte qui lui est imposée ne peut être justifiée par des intérêts prépondérants ; il y a contrainte notamment lorsque des douleurs, des maux ou des dommages sont causés à l’animal, lorsqu’il est mis dans un état d’anxiété ou avili, lorsqu’on lui fait subir des interventions modifiant profondément son phénotype ou ses capacités, ou encore lorsqu’il est instrumentalisé de manière excessive »1
Cela dit, la confédération attribue ici une dignité qui n’est pas simplement inhérente à l’animal. Un animal n’aurait pas de « dignité, » de « droits » si on ne les lui octroyait pas. Il n’y a que dans les sociétés humaines où un animal disposerait de tels droits. En dehors, les animaux vivraient en fonctions de leurs capacités à survivre dans leur environnement. Dépendant de quel animal d’élevage nous parlons, la capacité à survivre seul et prospérer de celui-ci varie grandement. Les animaux d’élevage ultimement bénéficie de leurs relations avec nous. Il conviendrait bien sûr pour d’autres raisons auxquelles je ne toucherai pas ici de respecter les animaux dans leur habitat naturel, cela dit, l’habitat « naturel » de bon nombre d’espèces, après des millier de génération d’élevage, est devenu « à nos côtés » et ces espèces ont besoin de nous pour prospérer.
L’homme est également un animal qui a besoin dans son alimentation de produits d’origine animale (viande, œufs, lait) pour sa bonne santé. Une alimentation végétale pure ne suffit pas généralement à survenir à ses besoins sans carences notable.
Par nécessité, l’élevage est donc justifié pour l’animal comme pour l’homme qui en ont tout deux besoins ou en bénéficient. Cela ne veut pas dire que les besoins et les intérêts des animaux ne doivent jamais être défendus. Cependant, les intérêts des animaux ne prennent pas toujours précédence sur les intérêts des hommes qui les nourrissent.
Si l’élevage en soit est justifié alors l’élevage à grande échelle l’est aussi dés lors que la façon dont celui-ci est effectué ne pose pas davantage de problèmes, dû par exemple à la concentration ou à la taille. Si changer les habitudes de consommations est un objectif de cette initiative, ses défenseurs devraient présenter un tel argument à la population et la convaincre en lieu et place de vouloir imposer indirectement mais uniformément des prix plus élevés à l’ensemble de la population.
Aujourd’hui, nous sommes capables de fournir de meilleures conditions de vie à nos animaux que dans le passé et c’est une bénédiction. Ne laissons pas notre apparente abondance nous tromper, nous avons de nombreux défis dans les années qui viennent à résoudre. Être le fer de lance de la cause animale n’est pas dans les intérêts de la Suisse et la Suisse n’est de loin pas en retard sur son temps. Il est donc à notre désavantage de voter oui à cette initiative populaire qui semble changer notre rapport à l’animal en augmentant la place que nous leurs octroyons dans notre processus de décision, ce qui n’est pas une urgence éthique dans le cadre de l’élevage tel qu’il a lieu en Suisse. Nous n’avons pas couvert ici les études éthiques ou scientifiques plus récentes sur les similitudes entre animaux et humains. Cela pourrait être fait, mais mériterait son propre article concernant les avancées moderne qui nous ont poussé à améliorer continuellement les conditions d’exploitations des animaux depuis les dernières décennies et ne semble pas pertinent dans le cadre de cette réflexion. La question est importante est mérite la discussion cela dis présentement il ne semble pas que nous soyons dans une situation qui requiert un changement d’une telle envergure.
1 https://www.blv.admin.ch/blv/fr/home/tiere/tierschutz/wuerde-des-tieres.html