Jusqu’à son Assemblée des délégués du 21 août dernier, on pensait que le Parti Libéral-Radical vivait dans son époque et avec les mœurs du XXIe siècle. De ce qui nous semblait acquis et ce qui aurait semblé cohérent avec leur vote au Parlement, il n’est plus rien : à une voix près, le PLR refuse le congé qu’il avait pourtant largement accepté au Parlement [1]. Le 27 septembre 2019, le groupe libéral-radical au Conseil national acceptait par 25 voix contre 8 le projet de congé paternité [2]. L’analyse de la politique suisse est connue : on ne passe pas une loi, on ne passe pas un projet au Parlement sans l’accord du PLR, parti ayant historiquement dominé la Suisse.
Les Jeunes Libéraux-Radicaux se félicitent du vote des délégués : se targuant de soutenir le congé parental en lieu et place des deux maigres semaines du congé paternité, ils appellent le PLR à soutenir et élaborer un projet de congé parental [3]. Ignorant probablement ce que leurs aînés – et certains de leurs représentants – au Parlement votent, il eût pourtant été de bon aloi qu’il cherchent un peu l’historique du vote au Conseil national : en 2014 déjà, le PLR refusait à l’unanimité un congé parental à 18 mois [4]. Si on peut mettre ce refus sur la durée du congé paternité, plusieurs motions et initiatives déposées par des PLR ont été abandonnées, faute d’avoir été traitées dans les… deux ans qui suivaient leur dépôt [5].
Le PLR n’a aucune envie de mettre en place un congé parental : celui-ci « coûterait trop cher ». Depuis le vote de son Assemblée des délégués qui a démenti son vote au Parlement, le parti a complètement disparu de la scène politique sur cet objet, comme s’il s’était mis lui-même dans une posture inconfortable avec ce choix. Dans les prochains mois, plusieurs initiatives parlementaires et motions concernant le congé parental seront traitées, déposées par tous les bords du Conseil national et du Conseil des États. Les votes du PLR seront scrutés par de nombreux observateurs ; on verra alors si le PLR est entré dans le XXIe siècle ou s’il est définitivement entré dans une autre interstice : l’hypocrisie.
[1] Le Temps, « Surprise, le PLR refuse le congé paternité », 22 août 2020, https://www.letemps.ch/suisse/surprise-plr-refuse-conge-paternite
[2] Procès-verbal du vote, réf. N°19624, https://www.parlament.ch/poly/Abstimmung/50/out/vote_50_19624.pdf
[3] https://twitter.com/JLR_CH/status/1297213768477421568, consulté le 22 septembre 2020
[4] Procès-verbal du vote, réf. N°14208, https://www.parlament.ch/poly/Abstimmung/50/out/vote_50_14208.pdf
[5] Plusieurs cas existent, mais l’objet n°14.3109 est l’exemple parfait : rejeté faute d’avoir été traité dans les temps, il émanait pourtant d’un Conseiller national PLR. https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20143109